Au début de septembre 1978, les Berkbigler et leurs enfants venaient tout juste d'emménager dans leur nouvelle maison, encore inachevée. Celle-ci se trouvait à quelques km de Tucson, dans l'Arizona, en plein désert. Les premières nuits qui suivirent leur installation, ils entendirent des bruits étranges contre les murs de la maison, comme si on lançait de grosses pierres. On n'avait pas la moindre idée d'où pouvaient provenir ces pierres et la police eut beau mener sa petite enquête, on n'avait trouvé aucun coupable. En somme, les Berkbigler étaient victimes d'un lanceur de pierres fantôme, d'une apparition qui s'amusait à prendre les maisons pour cibles.
Dès que les bruits se faisaient entendre, toute la famille se précipitait dehors pour prendre le coupable sur le fait. Bien inutilement, car il n'y avait jamais personne en vue dans l'espace désertique qui entourait la maison. Les coups commençaient ordinairement entre 5 h 30 et 7 h, au moment où tous les membres de la famille rentraient du travail ou de l'école. On entendait alors une brusque rafale de pierres, qui cessait puis reprenait quelques minutes plus tard. Il arrivait même que l'on entende frapper mystérieusement aux portes et aux fenêtres.
Au début, les Berkbigler se dirent, sans trop y croire, qu'il devait s'agir d'un vagabond. Mme Berkbigler confia pour sa part à l'Arizona Daily Star qu'un "esprit" s'en prenait peut-être à la maison et que celle-ci "avait peut-être été construite sur un site sacré ou quelque chose comme cela".
La presse se mit bientôt à parler du "lanceur de pierres fantôme". Le chef de police de l'endroit inspecta la maison et fit survoler les lieux par un hélicoptère. Comble de l'ironie, la police fut bientôt victime à son tour du "lanceur fantôme" et commença à montrer moins de zèle dans sa surveillance.
Le 4 décembre, un dimanche, les choses prirent une tournure plus insolite encore. Ce jour-là, les jets de pierres s'étaient poursuivis de manière sporadique. Deux journalistes du Star en avaient profité pour interviewer la famille "à chaud". Mais vers 18 h, ce soir-là, il y eut une telle avalanche de pierres, lancées sur l'une des portes de la maison, que les journalistes n'osèrent sortir. Le siège dura 2 heures et les Berkbigler, exaspérés, durent faire de nouveau appel à la police, qui escorta les journalistes jusqu'à leurs voitures.
Mais voici le plus curieux : la porte qui avait ainsi subi les assauts de pierres se trouvait sur le côté de la maison et il fallait traverser le garage pour y accéder. En outre, une caravane y était garée de telle sorte que, pour toucher la porte, il avait fallu que les pierres soient lancées avec une rare dextérité, à travers le mince espace de moins d'un mètre qui séparait le plafond du garage du toit de la caravane. De toute évidence, pour le "fantôme", ce n'était qu'un jeu d'enfant.
Les 6 et 7 décembre, la situation atteignit son paroxysme. Des dizaines de personnes s'étaient rassemblées autour de la maison pour participer à la chasse au "fantôme" et elles eurent beau fouiller de fond en comble le terrain des Berkbigler, les pierres n'en continuaient pas moins de tomber. Elles atteignaient les investigateurs dominicaux et bénévoles, les uns et les autres, avec une précision que la lumière éclatante sur le sol noir tout autour rendait plus hallucinante encore. La troupe improvisée ne réussit qu'à chasser un intrus qui s'était introduit dans la propriété : il apparut qu'il s'agissait d'un membre du bureau du chef de police !
Puis, les pierres se turent, tout simplement. Après deux nuits de recherches, le siège quotidien dont étaient victimes les Berkbigler depuis des mois s'arrêta, sans que l'on n'ait jamais pu découvrir depuis lors l'identité du mystérieux lanceur de pierres.